LES INEGALITES DE REVENUS DANS LE MONDE : QUE RETENIR DU « CITIZENSHIP PREMIUM » DE BRANKO MILANOVIC ?

J’ai eu l’occasion de lire les travaux de Branko MILANOVIC, Economiste en Chef à la division des études sur la pauvreté et les inégalités à la Banque Mondiale. L’article s’intitule: “Global Income Inequality by the Numbers: In History and Now; an Overview”. Publié en 2012, le travail permet de faire une analyse et un bilan de la mondialisation à travers des chiffres, des faits historiques et la situation actuelle. Et voici, en trois sections, ce j’ai appris !

  1. Des résultats controversés et riches en enseignements

Le travail de MILANOVIC (2012) ne permet pas de conclure que la mondialisation est favorable aux pauvres. En effet, la période d’étude, qui s’étend de 1988 à 2008, permet à l’auteur de dégager deux grandes tendances à savoir les gagnants et les perdants de ces deux dernières décennies de mondialisation. Le diagramme ci-dessus permet alors de montrer ces deux tendances. C’est le « diagramme de l’éléphant » selon les économistes.

Figure 1 : Evolution des Inégalités dans le Monde 1988-2008

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Source : Milanovic (2012).

Ainsi, les gagnants sont les plus riches dans les pays et les classes moyennes des économies émergentes de la Chine, l’Inde, l’Indonésie et le Brésil. Cela équivaut à 200 millions de chinois, 90 millions d’indiens, 30 millions d’indonésiens, 30 millions de brésiliens et 30 millions d’égyptiens. Ces personnes ont vu leur revenu médian augmenter d’environ 70% pour la plupart et d’environ 80% pour un nombre limité durant vingt années de globalisation.

En 1988, un chinois ayant un revenu médian était seulement riche de 10% par rapport à la population mondiale. Cependant, vingt années après, ce dernier est riche de plus de 50% par rapport à la population mondiale. Donc, ce dernier a gagné 40% d’augmentation de sa richesse en 20ans. Les indiens sont passés de 10% à 27% ; les indonésiens de 25% à 39% et les brésiliens de 40% à 66%.

Les perdants du mouvement de globalisation sont les citoyens des pays riches dont les revenus ont stagnés durant cette période. La catégorie des perdants concerne aussi les pays de tradition jadis communiste, les pays d’Amérique Latine, et les pays d’Afrique. Pour ce qui concerne l’Afrique, en 1988, le revenu médian d’un africain équivalait au 2/3 du revenu médian global. Or, vingt années après, ce revenu équivaut seulement à moins de la moitié.

De façon spécifique, en  1988, un kenyan moyen était riche de 22% en plus par rapport à la population mondiale. Cependant, vingt années après, ce dernier est riche de seulement 12% par rapport à la population mondiale. Les nigérians sont passés de 16 à  13%.

2. Des conséquences pour les phénomènes migratoires et les systèmes économiques

En utilisant le Coefficient Theil, l’auteur conclu que le monde dans lequel nous vivons actuellement est un Monde Non-Marxiste. En effet, ses résultats montrent que les inégalités globales en 2008 sont supérieures à celles vécues en 1870. Le monde actuel est alors plus inégalitaire qu’avant.

Pour MILANOVIC (2012), 2/3 des inégalités dans le monde sont des inégalités de location c’est-à-dire l’appartenance à un pays ou à une région spécifique. L’auteur appelle cette situation : « Citizenship Premium ». En effet, il est désormais possible d’estimer le revenu moyen d’un individu, dans le monde, juste à partir de sa nationalité.

Le revenu des personnes pauvres dans les pays riches est notamment supérieur, en parité de pouvoir d’achat, à celui des personnes pauvres dans les pays pauvres. Par exemple, les personnes pauvres aux Etats-Unis, disposent de plus de revenus que les personnes de la Classe Moyenne dans les pays pauvres. De manière spécifique, les Danois les plus pauvres sont plus riches que les plus riches d’Ouganda (en parité de pouvoir d’achat).

Vaudrait mieux être un pauvre aux Etats-Unis au lieu d’être pauvre au Cameroun ! Voilà en somme une conclusion qu’on peut tirer lorsque l’auteur affirme que : En Albanie, 30% de la population ont des revenus en dessous du seuil de pauvreté Italien. De même, 80% de la population ivoirienne ont des revenus inférieurs au seuil de pauvreté en Italie.

Dit autrement, en rejoignant seulement les plus pauvres en Italie, ces 80% de la population ivoirienne et ces 30% de la population Albanaise seraient riches. Paradoxal résultat qui semble pourtant expliquer les vagues d’immigration observées, ces dernières années, au départ de l’Afrique vers ces régions. Les gens veulent devenir riches et décident de migrer vers les zones riches.

3. Les Leçons pour l’Afrique ?

L’Afrique doit urgemment redéfinir son idéologie et surtout sa politique migratoire. En effet, les Etats africains doivent mettre un accent sur la croissance des revenus au sein et entre les Etats. Cela passe par la mise en place du Marché Unique Africain qui doit pouvoir servir de cadre légal, au plan économique, à l’application des politiques de développement de l’Union Africaine. Pour cela, L’Afrique a davantage besoin de capitalistes. Ce sont ces derniers qui vont créer les richesses et transformer les systèmes productifs et économiques actuels. C’est un impératif !

Nous devons alors avoir nos Henri FORD, nos ROCKEFELLER, nos Thomas EDISON, nos ROTHSCHILD, nos Robert KIYOSAKI, nos Gregory MANKIW, nos Armanico ORTEGA, etc. Bien sûr que nous avons les DANGOTE, Tony ELUMELU, Baba DANPULO, Mohamed EL KETTANI, Paul K. FOKAM, Elisabeth DOS SANTOS, etc. Cependant, la vitesse et le rythme d’apparition de nouveaux capitalistes en Afrique doit s’accélérer afin de rattraper nos partenaires économiques et converger vers nos états stationnaires respectifs.

D’un autre côté, un accent doit être mis sur une redistribution plus égalitaire des ressources et des fruits de la croissance. Il ne s’agit pas de taxer les plus riches mais de renforcer l’efficacité des filets sociaux notamment à travers le recours au digital. En effet, le succès et l’essor des paiements mobiles sur le continent sont une piste à privilégier. Pour cela, il faut mettre en place des programmes d’éducation financière nationaux dans l’optique d’accroître la portée de ces projets et permettre aux populations d’atteindre le « fameux » bien-être financier.

 

En conclusion, l’Afrique a deux choix légitimes à faire pour les deux décennies à venir : en premier, choisir de s’enrichir et stopper la vague migratoire actuelle ou alors, en second, se vider de sa population jeune partie vers un mieux-être !

 

  • Je me nomme Ulrich D’POLA KAMDEM,
  • Je suis Economiste-Banquier, Monétariste et Eudémoniste ;
  • Et, je pense que l’Afrique doit cesser d’être « la prostituée de la mondialisation ».

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